mardi 7 août 2012

Shymkent, Sayram et Aralsk

Saaalut!!!

François: On s'était laissés après notre agréable passage des douanes Ouz-Kaz! Après notre belle ride de minibus, on a débarqué au milieu de nulle part, en périphérie de la ville. Suite à une légère errance, on a fini par demander notre chemin puis on a pris un bus vers le centre et on a finalement trouvé notre hotel. En fait, notre hôtel était situé au sein d'un centre commercial un peu défraîchi (du genre la Plaza Ste-Thérèse). Au comptoir, il n'y avait personne... Finalement, un madame est arrivée puis nous a fait visite une chambre à l'étage. Comme la chambre était correcte malgré le fait que l'hôtel était désert, on l'a prise puis on est allés manger dans un petit resto situé en face dudit centre commercial. Comme on n'avait rien mangé depuis notre maigre déjeûner à Tashkent, disons que le laghman faisait du bien! Ensuite, on est allés à proximité écrire le blog dans un café Internet, puis on est revenus à l'hôtel dormir. Là, petit malaise: il n'y avait toujours personne à la réception de l'hôtel malgré les portes grandes ouvertes du centre d'achat sur la rue, et les couloirs menant aux chambres (innoccupées) à l'étage étaient très faiblement éclairés... Si on ajoute ça au profond silence ambiant (déchiré à l'occasion par des bruits sourds de dilatation dans le plafond), l'ensemble faisait assez glauque et pour la sécurité, on repassera... J'étais pas trop à l'aise mettons! On a fini par s'endormir, seulement pour être réveillés à 4h du matin par le vacarme des pigeons qui utilisaient le toit en tôle comme un chilling spot en vogue... On est ensuite allés déjeûner au restaurant (désert, ou presque) adjacent à l'hôtel ou était inclus notre déjeûner... De façon assez surprenante, c'était correct...! Après une bonne douche (froide), on est partis pour une nouvelle belle journée de paperasse: il nous fallait acheter 3 billets de train et nous enregistrer. Ah oui, on a oublié de vous dire ça: au Kazakhstan aussi il faut s'enregistrer (i.e. avoir une belle étampe sur notre déclaration de douane). Il faut normalement le faire une fois seulement et après ça va. Ça se fait automatiquement quand tu arrives au pays par avion, mais pour une raison bizarre, si tu arrives par la route, ben ils étampent pas ton papier et tu dois le faire toi-même en dedans de 5 jours sans quoi c'est 100$ d'amende... Cette aberration bureaucratique exige que tu fasses un tour à l'OVIR le plus proche, le bureau d'enregistrement des étrangers. Ça promettait côté paperasse!

Donc on est d'abord partis en bus vers la gare. Le gars qui collectait l'argent dans le bus (je sais pas si on vous l'a dit mais, dans les autobus publics, il y a le chauffeur et le gars/madame-qui-collecte-l'argent-et-gueule-les-destinations-du-bus-aux-passants-par-la-fenêtre) nous trouvait trop sympa et, peut-être pour nous faire plaisir (?), a demandé au chauffeur du bus de pousser au maximum le volume de la musique techno qui rugissait dans l'autobus, transformant le vieux bus pourri en partybus! On a aussi jasé un peu avec une jeune Kazakhe toute contente de nous parler en anglais et à qui on a laissé notre adresse courriel.... Honnêtement ce genre de scène a dû se produire une bonne dizaine de fois pendant notre séjour en Asie centrale: on ne compte plus le nombre de fois ou on a donné nos adresses courriel! On est finalement arrivés à la gare à moitié sourds et on s'est dirigés vers le guichet, ou une madame archi sympathique a bien voulu nous aider avec nos billets. À un certain moment par contre, on a réalisé qu'on ne pourrait pas aller à l'OVIR aujourd'hui parce que c'était dimanche et donc qu'on ne pourrait pas prendre de train le lendemain parce qu'ils faudrait s'enregistrer. S'enregistrer, oui, mais ou? Le Lonely Planet ne disait meme pas si on pouvait le faire à Shymkent! Un peu perdus, on a quitté la file et on s'est mis en tête d'aller voir sur Internet le site web de l'enregistrement donné par notre guide. Naturellement, la loi de Murphy jouant, il n'y avait aucun café internet près de la gare, malgré un tour de reconnaissance de ma part qui m'a tout de même permis de découvrir une magnifique fresque de Lénine peinte sur le côté d'un immeuble. On est donc revenus en ville en prenant le bus le plus lent du monde, pour découvrir au café internet qu'effectivement on pouvait s'enregistrer à Shymkent, mais sans savoir ou exactement. Par contre, on a appris que certains hotels pas trop chers pouvaient le faire pour nous, alors on a repris l'autobus vers un autre hotel situé tout près d'un immense monument avec fontaines et drapeau géants. Pour à peine plus cher, l'endroit était décidément mieux que la veille, à l'exception du staff hyper bête. On nous a rapporté qu'en Russie, le personnel hotelier est particulièrement désagréable: si c'est vrai, nous en avons eu un bel avant-goût! Ils ont malgré tout bien voulu nous enregistrer, mais le lendemain seulement...

Après ça, on est partis manger du plov dans une gargotte du coin puis on est retournés à la gare. Arrivés aux guichets, notre madame super fine allait prendre sa pause diner mais on s'est précipités et elle a bien voulu prendre un deux minutes pour nous aider!! Finalement, on a pu booker nos 3 billets de train!! Assez contents, on s'est dit que ce serait le temps de commencer à visiter la ville. Shymkent est une ville très jolie et relaxe, avec de beaux et grands parcs de même que de grands arbres feuillus, ce qui donne aux avenues une très belle allure. Les gens (sauf le personnel d'hôtel) y sont comme partout en Asie centrale d'une gentillesse ahurissante mais... reste qu'il n'y a pas grand grand chose à faire dans la ville même! C'est plutôt un arrêt obligé (bien qu'agréable) pour qui visite le sud du Kazakhstan! On a donc marché un peu le long de la plus grande rue et on est tombés sur la South Kazakhstan State University. Puisqu'on nous avait demandé d'y jeter un oeil, on est allés faire un tour en touristes. La place était pleine à craquer d'étudiants venus s'inscrire, alors disons que c'était très animé! Après, on a flâné lentement vers le parc central de la ville ou on est restés assis sur un banc près d'une fontaine en forme de pissenlit à parler et à observer les gens pendant un bon moment. Pendant qu'on était là, on s'est fait donner du jus dans ce qui nous semble être une opération promotionelle puis deux madames avec un bébé sont venus nous jaser un bon moment, nous demandant ce qu'on faisait comme voyage, si on aimait le Kazakhstan, etc., etc.!! Puis, on s'est mis à la recherche d'un resto pour souper. Encore une fois, on ne trouvait que l'habituel plov-laghman-shaslick (mais comment font-ils pour ne manger que ça???), au grand désespoir de Mémé, jusqu'à ce qu'on trouve une cafétéria pas trop mal. On est ensuite revenus faire du lavage à l'hotel. Bref, une journée pas vraiment enlevante, mais disons qu'avec toute la paperasserie, c'était prévisible!

Le lendemain, Mémé a été déjeuner au resto de l'hotel parce que, grosse niaiserie, comme on payait pour une chambre, ben c'était un déjeuner qui était compris, même si on était deux! Ensuite a commencé la pénible tentative de voir comment on allait être enregistrés avec l'OVIR. Le staff, aussi agréable qu'une gastro, nous a d'abord fait comprendre (les deux femmes de la réception ne parlaient pas un mot d'anglais) que ce service-là nous coûterait un peu moins de 10$ par personne (alors que c'était gratuit selon ce qu'on avait lu sur internet) et ensuite qu'on ne pourrait ravoir nos passeports qu'à 14h (il était 9h): on pourrait joyeusement perdre notre temps à les attendre sagement à l'hôtel. Comme on voulait faire quelque chose de notre journée, on leur a dit qu'on irait ailleurs puis qu'on reviendrait à 14h prendre nos passeports à la réception. Les 2 se sont alors mises à nous engueuler en russe, on ne comprenait plus rien jusqu'à ce qu'une bonne âme dans le lobby appelle une amie qui parlait anglais qui a finalement pu nous expliquer qu'on n'avait pas le droit de ne pas avoir nos passeports sur nous et que la police pouvait nous arrêter autrement! Ben là! Ça aurait été si difficile que ça de dire et mimer "niet passeport problem politisia"??? On s'est donc résolus à attendre dans notre chambre que nos papiers reviennent, ce qui n'a pris que 2 h finalement (au moins!).

Une fois notre situation régularisée au Kaz, on a pris un minibus vers la gare de bus.  Naturellement, il était bondé: avez-vous déjà essayé de vous tenir debout dans l'arrière d'une camionnette? Disons que ça fait mal au dos! On a raté notre arrêt et, comme toujours, tout le monde était beaucoup trop gentil et essayait de nous aider: le chauffeur a fini par arrêter un autre minibus qui allait dans la bonne direction et on est embarqués dedans! Une fois rendus à la gare, drame: Mémé avait oublié ses lunettes de soleil dans le premier minibus! Avec quelques babounes, on a pris un autre autobus vers notre destination, le petit village de Sayram, ou il y avait apparemment de petits monuments à visiter. Le village était poussiéreux mais très animé, avec un cachet de campagne qui nous l'a tout de suite rendus assez sympathique à nos yeux. Comme on mourrait de faim, on a commencé par dénicher un petit resto situé dans un sous-sol et ou les télés diffusaient en continu des images de La Mecque (je ne savais pas qu'il existait un genre de CNN mais exclusivement dédié à La Mecque!) Les plats qu'on a mangés sont parmi les meilleurs qu'on a eus (surtout pour le prix!) au Kazakhstan! Au bout d'un moment, la serveuse est venu nous amener deux gros verres de kampot, l'excellent jus de cerise kazakh. Comme on n'avait rien commandé, on était un peu surpris mais la serveuse nous a fait comprendre que c'était le gars et ses amis à une autre table qui nous l'offrait! Comme on le remerciait, le gars est venus nous parler. Enfin, parler: il ne parlait que russe et kazakh, mais on pouvait quand même se débrouiller pour des choses basiques du genre "ou travaillez-vous", "vives-vous à Sayram", enfin vous voyez le genre! En tout cas il était bien fin, on lui a aussi donné notre adresse courriel et on est ensuite partis explorer le village. On cherchait un minaret mais on est plutôt tombés sur quelques mausolées. Il faut le dire, ils étaient moins impressionnants, plus petits et moins colorés qu'en Ouzbékistan, mais c'est compréhensible quand on sait que seul l'extrême-sud-ouest du Kazakhstan était sédentaire autrefois (le reste étant habité par des nomades, il ne reste aucun monument ou presque). Au moment de visiter le 2e mausolée, un monsieur (très petit) qui passait en Mercedes nous a arrêtés et a tenté de nous expliquer qu'il voulait être notre guide pour nous faire visiter les environs. Il était bien gentil mais comme on n'a jamais réussi à comprendre si c'était gracieusement ou non, on a refusé poliment... On a ensuite marché assez longtemps en direction d'un hypothétique 3e mausolée qu'on a finalement jamais trouvé (le Lonely Planet, qui avait décidément quelques ratés ces jours-là, ne donnait pas de carte du village) et on est revenus vers le centre en passant sous une grande arche. On a fait un peu de magasinage dans le bazar local (Mémé a fait bien glousser les vendeuses en essayant des robes) puis on a acheté une crême glacée et des genres de petits gâteaux secs qu'on a mangé en cherchant le fameux minaret. Après plusieurs tentatives infructueuses, on l'a finalement déniché... Disons qu'à 15 mètres de haut, c'est pas le plus gros! Mais on était (ok ok j'étais) vraiment content d'avoir pu admirer la vue du haut de cet imposant édifice!

Après ça, on est rentrés à Shymkent sans problèmes, on est allés au bazar acheter à manger pour notre épopée en train vers Aralsk (on partait le soir même, à 1h du matin), on est allés chercher nos trucs à l'hôtel puis on a trouvé un super resto ou les serveurs étaient encore une fois tout contents de nous avoir et de parler avec nous en anglais! Après un repas une coche au-dessus de l'ordinaire habituel (c'était décidément une bonne journée), on a filé au café internet écrire le blog en attendant notre train. Une heure avant le départ de notre train, on a pris un taxi pour se rendre à la gare (enfin, comme on fait ici, on a fait signe à n'importe quelle voiture de s'arrêter). Le gars qui nous a pris, un policier qui revenait de la job, a accepté tout de suite notre prix et était vraiment sympa! Comme la rue menant à la gare était bloquée, il a fait un super long détour, au point ou on commencait à s'inquiéter un peu et à douter qu'on se rendrait bien un jour à la gare. Finalement, nos soupçons étaient totalement non-fondés puisque non seulement on s'est bien rendus mais, en plus, au moment de payer, le gars nous a dit théâtralement: "No no I can not accept, you are guest in my country, keep your money!" Malgré nos protestations, il ne voulait rien savoir... On vous déjà dit à quel point les gens en Asie centrale sont extraordinaires?

Après un peu d'attente, on a pris notre train pour Aralsk (18h de trajet), une ville éloignée dans l'ouest du Kazakhstan située au bord de ce qui fut autrefois la mer d'Aral. Surprise: on avait notre compartiment pour nous tout seuls!! On a bien dormis puis, le lendemain, on a été périodiquement dérangés par des madames qui voulaient nous vendre des cossins. Il y en a une qui était particulièrement collante: elle vendait des poissons fumés et elle est passé au moins 5 fois, en restant un bon 5 minutes à chaque fois même si on lui faisait comprendre très clairement qu'on ne lui achèterait pas ses poissons! À un moment donné, elle a juste laissé son tas de poissons sur le lite de Mémé puis elle est partie! On est restés un peu bêtes et alors que j'essayais de lui courrir après pour lui remettre ses fichus poissons, elle est revenue avec encore plus de bébelles à vendre! Elle a finalement arrêté de vouloir nous vendre des affaires quand Mémé s'est mise à lui parler uniquement en français! Comme elle ne comprenait rien, elle est vite partie!

On a aussi vécu un épisode un peu plus troublant qui en dit peut-être long sur la surveillance interne au Kazakhstan... Après un certain temps, deux gars en civil sont entrés dans notre compartiment et nous ont tendu des cartes d'identité sur lesquelles on voyait très bien qu'ils étaient de la police. Ils ont demandé nos passeports et nos déclarations de douane. Un peu méfiants, on leur a d'abord tendu les photocopies mais ils insistaient pour voir les originaux. Ils ont regardé nos documents un certain temps, nous les ont redonné puis sont repartis sans un mot. Police secrète ou simplement des policiers en civil? On n'a jamais trop su. Ce qu'on sait c'est que l'ouest du Kazakhstan est une zone un peu plus sensible depuis les émeutes de décembre 2011 qui y ont fait quelques morts et pour lesquelles le gouvernement a été très critiqué, chose rare ici. En tout cas...

Le reste du trajet à travers la steppe semi-désertique a été sans histoire. On a croisé en chemin la base de lancement spatial de Baikonour mais il n'y avait pas de décollage ce jour-là (apparemment que visiter ça est possible mais très complexe et coûteux: dommage, ça aurait été plaisant!). Finalement, on est arrivés à Aralsk.


MP: Comme le train est arrivé à Aralsk avec un peu de retard, on s'est dépêchés pour aller à l'agence d'écotourisme le plus vite possible, sinon il aurait fallu dormir au miteux hôtel Aral! Le centre-ville d'Aralsk est minuscule, mais on a quand même pris quelques minutes pour trouver la place, aidés par un monsieur un peu bizarre qui avait très envie de parler à François. On a finalement appris qu'il était le frère d'une des employées de la compagnie et qu'il était saoul (il n'était même pas 18h)... Le gars de la compagnie nous a expliqué le plan, on a discuté des coûts, etc., puis la dame chez qui on allait dormir à Aralsk est venue nous chercher pour nous mener chez elle. Aralsk est une ville assez pauvre, anciennement 2x plus grosse dans le temps ou la mer s'y rendait et que l'industrie de la pêche était forte. Maintenant, ça a l'air un peu abandonné, les rues en terre, les maisons entourées de clôtures en tôle... On est partis à la recherche d'un petit café avec l'espoir de trouver quelque chose de réconfortant pour Franco qui avait mal au ventre. Malheureusement, ce ne fut pas le cas, c'était même pire que tout! La fille nous a présenté les plats qu'elle avait, mais finalement elle n'a rien compris de ce qu'on voulait et on s'est ramassés avec 2 plats de ce que François avait commandé, et c'était loin loin d'être appétissant: un gros tas de céréales brunes, un oeuf miroir à peine cuit (ce qu'on n'aime pas) et une saucisse hot-dog toute molle... En fait, c'est le pire restaurant qu'on ait fait depuis le début du voyage, c'était horriblement mauvais. En plus, le thé était tiédasse et c'était quand même cher au final. Au moins, ils avaient les Olympiques à la télé, donc ça nous a fait passer le temps, parce que le temps passe lentement à Aralsk! On est ensuite revenus à notre homestay ou notre madame avait invité une voisine avec laquelle elle mangeait en buvant de la vodka. François a eu droit à quelques déclarations d'amour et à deux shots de vodka puis on est allés de coucher.

On a déjeuné avec notre madame du homestay, une espèce de bouillie blanche à la levure et des oeufs miroir, un déjeuner asie-centralien normal quoi. Notre chauffeur est venu nous chercher dans sa vieille jeep beige en tôle et ce fut le début d'un long deux heures de nids de poule dans le désert! Dès qu'on a quitté la ville, on est descendus dans ce qui a déjà été le lit de la mer d'Aral. C'était assez dur de croire que les steppes qu'on voyait à perte de vue avaient déjà été recouvertes d'eau. De temps à autre, on voyait les contours de ce qu'il reste de la mer, mais on croisait surtout beaucoup de chameaux! Il y en avait partout, je n'aurais pas cru qu'on allait en voir autant. On est arrivés à Jalanash, un petit village ou il y a non loin un cimetière de bateaux. Il y en a déjà eu 7, mais les gens ont commencé à récupérer le métal des bateaux donc maintenant il n'en reste que trois. C'est quand même fou de penser que ces bateaux-là n'ont pas été déposés là par exprès, mais qu'il y avait bel et bien de l'eau ici avant. On se rend compte aussi à quel point il devait y avoir de l'eau: on voit au loin des falaises de peut-être 200 m de haut, qui devaient jadis être recouvertes ou du moins être atteintes par l'eau! Alors qu'on prenait des photos de chameaux qui se reposaient sous un gros bateau (il y en a encore un qui m'a craché dessus quand j'ai voulu approcher, ça a pas l'air très sympa comme animal), on s'est rendus compte que notre batterie d'appareil photo était vide! On a continué notre route en passant de temps à autres dans des villages, ou le chauffeur arrêtait pour jaser avec de vieux amis. On est finalement arrivés au village ou on allait passer la nuit. Le chauffeur est descendu parler avec le monsieur de la maison, puis on est partis vers la mer à quelques kilomètres. Rendu là, le chauffeur a essayé de nous faire comprendre qu'on ne pourrait pas dormir au village. Avec l'aide très rudimentaire de notre guide français-russe, on a un peu compris que quelqu'un était mort au village et qu'on allait devoir passer la nuit ici sur la plage, dans des maisons de pêcheurs. J'ai écrit trop vite, "maison" est un beaucoup trop grand mot. C'était un trou dans la terre. Vraiment. Comme une maison de hobbit mais en vraiment crade. De l'extérieur, la seule façon de voir qu'il y a quelque chose là c'est qu'on voit la cheminée du poêle sortir du sol. On entrait sous terre et on tombait dans un espèce de bunker plein de sable, tout sale, plein de pêcheurs sales fumant clope sur clope. À 60$ la nuit, on trouvait ça un peu exagéré de dormir là-dedans. On a donc essayé par tous les moyens de rejoindre quelqu'un qui pourrait nous traduire et nous expliquer. Le gars de l'agence était parti, on n'a jamais compris s'il avait un cellulaire ou non, on a aussi essayé d'appeler Talgat mais le cellulaire du chauffeur n'avait pas l'air de marcher. Bref, on a fini par se dire qu'il valait mieux dormir là-dedans et profiter de la mer que de repartir tout de suite vers Aralsk... On est entrés dans le trou et on a regardé les autres jouer aux cartes en se demandant si on allait avoir ou non un dîner. Écourés par la fumée de cigarette, on est partis vers la plage. Autre déception: la "plage" était en fait de la boue et il fallait dépasser 3m d'algues pour se rendre à l'eau...

On est revenus vers le bunker et on a mangé des nouilles sauce à l'huile et au boeuf en conserve. C'était quand même assez bon étonnamment! On a pu avoir une conversation très rudimentaire avec les pêcheurs. On a dit qu'on était mariés et ils ont demandé (comme tout le monde le fait ici) si on avait des enfants. À notre réponse négative, ils ont fait une face à François du genre "Ouin tu fais pas ta job", déclenchant l'hilarité de tous les autres gars de la place. Ils n'avaient pas l'air super enthousiastes qu'on soit chez eux donc on n'a pas beaucoup parlé mais ils ont eu l'air de beaucoup aimer lire notre guide de conversation français-russe. Après le dîner on est allés marcher sur le bord de l'eau. Si on oublie les algues du début, la mer est très belle et les paysages de steppes sont assez sympas. L'eau est vraiment limpide, ce qui est surprenant, on était sûrs que ça allait être pollué à cause de tous les pesticides que les soviétiques ont utilisés dans leurs champs de coton. L'après-midi a donc été très relax, on a marché et on a jasé assis sur une chaloupe au bord de l'eau. Notre chauffeur est venu nous chercher pour le souper, et on a eu droit à une nouvelle portion de nouilles au boeuf en canne. Les pêcheurs, qui étaient partis en ville, sont revenus et sont allés vers la plage. Là on était vraiment énervés parce qu'on se disait qu'ils allaient aller pêcher et on espérait pouvoir y aller avec eux! C'est en effet ce qu'ils comptaient faire vu que la mer s'était calmée, mais malheureusement ils ont découvert que leur barque avait un trou... Ils ont donc passé la soirée à réparer leur bateau. Un peu déçus, on est retournés avec eux au bunker et on les a regardé jouer aux cartes toute la soirée, essayant de comprendre les règles de leur jeu (ce qu'on a jamais réussi à faire). On se serait crus dans un vieux saloon du far west, parce qu'en plus ils n'avaient pas l'électricité donc on s'éclairait avec une lampe à l'huile et une ampoule au plafond connectée à la batterie de leur jeep... On ne pourrait donc pas recharger l'appareil photo! Ce qui était encore moins bien, c'est qu'ils fumaient cigarette sur cigarette, il y avait un nuage dans l'air, c'était irrespirable! Je passais mon temps à sortir pour m'aérer un peu, mais je finissais toujours par rentrer quand une bestiole X grouillait dans les buissons à côté... Finalement, un des gars nous a montré l'endroit ou on allait dormir, un autre bunker sous la terre, mais là ils avaient enterré une ancienne carcasse de camion rouillée pour faire les murs et le toit. C'était sale et un peu glauque, et justement on s'est mis à imaginer tout ce qui pourrait nous arriver ici dans cette carcasse de camion sous terre, dans les steppes profondes alors que personne ne savait qu'on était là. On a aussi paranoïé (ok, surtout moi) quant au fait que peut-être que tout ça était arrangé et bla bla bla. Bref, moi j'étais vraiment stressée et je me voyais déjà fracasser la lampe à l'huile sur la tête du pêcheur qui viendrait nous couper la gorge pendant la nuit. Ils ont fini par rentrer dans notre bunker pour dormir et on a fini par dormir aussi.

Après une nuit plus ou moins bonne, on s'est fait réveiller par un pêcheur criant "chai chai chai" (thé) pour nous faire lever. Quand on est sortis, on a vu un petit hérisson qui s'était pris dans un vieux filet de pêche! C'était probablement ça que j'entendais dans les buissons la veille, et il a dû se débattre longtemps parce qu'il avait l'air tout faible et avait une patte en sang à cause d'une des mailles du filet. C'était vraiment triste donc on a essayé de le sauver, avec une tige en métal, des ciseaux et un canif. On a réussi à couper chaque maille qui était prise dans ses pics, ce qui a été très long, d'autant plus qu'on avait pas envie de se faire piquer non plus! On a fini par le libérer, il ne restait qu'un bout du filet pris trop profondément sur son dos. Il a été capable de se lever et a marché quelques mètres jusqu'à un ce qu'il rentre comme un épais dans un buisson, ou il est resté pris. J'essayais de lui faire peur pour qu'il aille un peu plus loin mais on s'est dit que peut-être qu'il voulait se reposer là. On était vraiment contents et on est allés déjeûner avec notre chauffeur (des biscuits secs et du thé, un déjeuner de champion...). J'étais tellement contente d'avoir sauvé la vie d'un hérisson que j'ai même osé montrer au chauffeur mes médiocres talents en dessin en lui dessinant la scène! L'avant-midi a été consacré à la plage, François le preux chevalier a même essayé de me faire un chemin entre les algues mais c'était peine perdue tellement il y en avait. On s'est baignés un peu, l'eau était bonne. En fait, on ne peut pas beaucoup se baigner car le fond de la mer est vraaaaaaiment plat (d'ou le paysage de steppes partout), même après 30 m on a juste de l'eau aux fesses! Dans l'eau, il y a les mêmes buissons qu'on retrouve en-dehors de l'eau, ce qui pourrait laisser croire que la mer reprend tranquillement sa place. Il paraît même que d'ici 2030, l'eau devrait se rendre à Aralsk (à 60 km!)!!

On a rejasé sur la chaloupe, puis le chauffeur nous a fait comprendre qu'il aimerait qu'on parte bientôt. On est repassés voir notre ami le hérisson qu'on avait appelé Riba (poisson en russe). Il était dans son buisson encore, mais malheureusement il était mort... Probablement qu'il s'était trop épuisé pendant la nuit... Au moins, il avait un air beaucoup plus reposé que quelques heures plus tôt donc on s'est dit qu'au moins il était mort plus heureux! On a dit merci aux pêcheurs et on est partis pour deux heures de souffrance dans le jeep.

De retour à Aralsk, on avait comme vague plan de se promener sur le rivage et d'aller voir un mémorial aux anciens pêcheurs. Chose la plus étonnante qui soit dans cette bourgade perdue de 30 000 habitants: croiser d'autres touristes! C'était 3 hongrois qui voyageaient 10 jours au Kazakhstan. Ils nous ont dit qu'ils voulaient aller à la piscine, et on les a suivi. C'était un concept assez étrange: dans une espèce de grosse tente en plastique ou les anneaux olympiques sont dessinés en gros, il y a une petite piscine gonflable, des exerciseurs et un table de ping-pong... On a jasé avec les Hongrois dans la piscine à l'eau semi-transparente. On a aussi pu prendre une douche, chose quand même rare dans ce voyage! Après, le plan était d'aller voir une ancienne usine de mise en conserve de poisson. Le seul moyen qu'on a trouvé pour y arriver était de sauter par-dessus les clotures en béton. J'étais semi-sûre que c'était une bonne idée de risquer la questionnette par des policiers kazakhs, mais rendus de l'autre côté, on s'est aperçus qu'il y avait plein d'autres moyens d'accéder légalement au site. On a marché sur les rives, côtoyant les immenses grues pour décharger les bateaux. On a marché plus loin jusqu'à des carcasses de bateaux, la vue de la ville était assez glauque, genre ancienne ville industrielle à l'abandon. En revenant vers la ville, on a croisé deux autres touristes britanniques! C'est quand même assez incroyable! On est tous allés dans un resto pour souper ensemble. Comme j'étais celle qui parlait le plus de russe (c'est dire...) je suis allée voir ce qu'ils avaient au menu. J'ai eu la chance de comprendre tout ce que la fille disait et de pouvoir expliquer les plats aux autres, alors tout le monde était convaincu que je parlais parfaitement russe! On a passé un super beau souper puis on a marché avec les Hongrois vers la gare de train. Le nôtre était 20 minutes plus tard, les pauvres allaient attendre le leur jusqu'à 3h du matin! On s'est fait inviter à Budapest avant de sauter dans notre train pour rencontrer nos deux peu-charmants compagnons de cabine. Le voyage vers Turkestan s'est bien passé, on a même eu froid pendant la nuit avec le vent du désert, une sensation qu'on avait presque oubliée!

2 commentaires:

  1. Bonjour Les Courageux Narrateurs!

    Quelques remarques en vrac:

    C'est vraiment gentil d'avoir écrit deux jours de suite!!! Heureusement je n'avais pas pensé à regardé le blog hier! Je dis "heureusement" car, si je l'avais lu hier, j'aurais passé une mauvaise nuit à m'inquiéter pour Marie-Pascale. Mais là au moins j'ai pu lire, quelques minutes seulement après le passage de douane "intestinal", le rapport de la journée suivante qui laisse espérer que ça va mieux!

    Autre constatation: les journées en Asie centrale durent plus de 24 heures! En tous cas, quand j'énumère ce que vous avez fait en une journée, j'ai souvent cette impression.

    Je sais bien que quand on se dit "Ils sont fous ces XYZiens!" c'est qu'on n'a pas compris la logique particulière de XYZistan! Et je comprends qu'il est difficile de faire entrer un train ou un avion dans le centre d'une ville millénaire. Mais un bus, pourquoi pas faire arrêter le trajet Québec-Montréal quelque part à Boucherville tant qu'à faire!



    Quand à la bouffe, une mini bande dessinée m'est venue à l'esprit, mais comme mes talents de dessinateurs sont encore moins bons que ceux de narration je vais me contenter de décrire les cases:

    Première case: MP et F sont assis à leur premier restaurant en Asie Centrale. F demande à la serveuse des menus.

    Deuxième case: La serveuse a donné à MP et F deux menus format carte à jouer, Il y a un point d'interrogation au dessus de chacune de leurs têtes.

    Troisième case: MP (qui se débrouille mieux en XYZtan) demande à la serveuse: "C'est cela le menu du restaurant?"

    Quatrième case: la serveuse semble très surprise, presque effrayée et répond "OH Non Madame! Ça c'est le menu pour toute l'Asie Centrale. Celui du restaurant c'est les trois premières lignes!"

    Espérant que le plaisir des yeux continuera à compenser pour la lassitude du palais!

    André

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  2. Comme Reader m'offre vos écrits sitôt publiés, j'ai eu le temps, moi, de me désoler pour MP à qui on a refusé l'accès des toilettes. Je dis désoler alors que c'est indigner.
    K

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